Analyse d’une affaire fiscale : recours et contrôle ultérieur en matière d'impôts au Luxembourg

Analyse d’une affaire fiscale : recours et contrôle ultérieur en matière d'impôts au Luxembourg

Dans une décision publiée le 6 août 2025, la Cour administrative du Grand-Duché de Luxembourg s’est prononcée sur un litige opposant une société anonyme à l’administration des Contributions directes, un dossier qui illustre plusieurs principes fondamentaux du droit fiscal luxembourgeois, particulièrement sur le contrôle ultérieur des déclarations fiscales et les voies de recours disponibles pour les contribuables.

Contexte du litige

La société en question avait, en 2017, déposé sa déclaration pour l’impôt sur le revenu, l’impôt commercial communal et l’impôt sur la fortune concernant l’année fiscale 2016. Par la suite, elle découvrit une erreur concernant le traitement d’un dividende qui, selon la société, aurait dû être exonéré. Une déclaration rectificative fut déposée après l’émission des bulletins d’imposition, mais en dehors du délai légal de trois mois pour demander un redressement.

Face au refus de l’administration de prendre en compte la déclaration rectificative hors délai, la société a tenté de faire recours, arguant essentiellement qu’un contrôle ultérieur était possible tant que le délai de prescription de cinq ans n’était pas expiré et que la notion de « force de chose jugée » ne saurait s’appliquer à un bulletin émis sous réserve de contrôle ultérieur.

Les arguments juridiques en débat

La société estime que, même après ce délai de trois mois, le bureau d’imposition doit exercer son pouvoir de contrôle ultérieur, surtout lorsqu’il est informé d’une erreur pouvant affecter le montant d’impôt réellement dû. Elle s’appuie également sur le principe d’équité (§2 StAnpG) et le principe général d’agir « à charge et à décharge » (§204 AO) pour soutenir l’obligation de correction en faveur du contribuable.

Cependant, la Cour rappelle que le §100a AO, qui permet au bureau d’imposition de fixer l’impôt sur seule base de la déclaration, institue un régime où le contrôle ultérieur est laissé à la discrétion de l’administration et non à l’initiative du contribuable. Les voies de recours pour demander la modification d’un bulletin sont strictement encadrées dans un délai de trois mois suivant la notification des bulletins sur déclaration. Passé ce délai, aucune demande de redressement ou rectification n’est recevable, sauf dans certains cas précis prévus par la loi.

Décision de la Cour administrative

La Cour a jugé que la société n’avait pas agi dans les délais pour faire rectifier les bulletins d’imposition. Elle confirme que le choix d’effectuer ou non un contrôle ultérieur reste discrétionnaire et ne peut être imposé par le contribuable après expiration des délais de recours, même si une erreur a été commise dans la déclaration d'origine.

La Cour précise également que l’exercice du pouvoir discrétionnaire par l’administration doit rester conforme aux critères d’équité et d’opportunité, mais dans ce dossier, la décision de ne pas procéder à un contrôle ultérieur est conforme à la loi et aux objectifs poursuivis par le régime du §100a AO. En conséquence, l’appel de la société a été rejeté et le jugement entrepris confirmé, condamnant la société aux frais d’instance.

Enjeux pour les professionnels et entreprises

Cet arrêt souligne l’importance pour les sociétés et professionnels de respecter les délais légaux pour toute demande de modification ou réclamation relative à l’impôt. Il rappelle que l’administration fiscale bénéficie d’un pouvoir discrétionnaire dans la gestion du contrôle ultérieur des déclarations et que les voies de redressement pour le contribuable sont limitées dès lors qu’un bulletin d’imposition acquiert force de chose décidée suite à l’expiration des délais.

Pour les fiduciaires et conseillers, il est primordial d’accompagner attentivement leur clientèle dans la gestion des déclarations fiscales et de vérifier sans délai l’exactitude et la complétude des informations transmises, afin d’éviter tout contentieux ultérieur difficile à résoudre.

Cet article vise à apporter un éclairage sur la jurisprudence récente et sur l’importance du respect des procédures fiscales au Luxembourg, un enjeu central pour la sécurité et l’optimisation de la gestion fiscale des entreprises.

Pour toute question ou besoin d’accompagnement, contactez votre partenaire fiduciaire EcoSolidaire Luxembourg.

Réfrences :

COUR ADMINISTRATIVE, Audience publique du 6 août 2025 Appel formé par la société anonyme (A), …, contre un jugement du tribunal administratif du 18 décembre 2024 (n° 48041 du rôle) dans un litige l’opposant à une décision du directeur de l’administration des Contributions directes en matière d’impôts.

Rédigé par Noura Jafout
Publié par EcoSolidaire Luxembourg
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